Dans les cultures pré-chrétiennes grecque et latine le mois de Mai est lié au symbole de la renaissance de la compagne. En Italie et dans tout le bassin méditerranéen le mois de Mai est symbolisé par la fertilité. 

Bien plus tard, la religion catholique se réappropriera ce rituel en imposant la figure de la Madone, substituant la « Mère païenne » à la  « Mère chrétienne ». Un syncrétisme visible par l’analyse de la fête de la « Madonna del Bagni », fêtée le mercredi suivant de l’ascension et le dimanche qui le suit, à Scafati dans la région de Campanie. 

La Madonna del Bagni

La légende dit qu’un sanctuaire dédié à la Madonna del Bagni a été construit à Scafati, village dans lequel une icône de la Vierge Marie aurait été trouvée. Son nom, elle le doit à l’eau de cette région réputée bienfaisante et miraculeuse.

Dans la région de Naples, sept sanctuaires sont voués à la Vierge Marie. Tous les ans y sont célébrées les Madones. Il est dit que ces sept différentes Madones seraient liées, qu’elles seraient sœurs. La Madonna del Bagni est une de ces sept sœurs. Jamais l’Eglise n’en a parlé.

La célébration

Le mercredi de l’ascension face au sanctuaire, les fidèles accourent pour lancer des pétales de rose, symbole de Vénus et de la Femme, sur l’icône de la Vierge Marie. Une vieille femme les bénit alors faisant une croix avec une plume trempée dans l’eau bénite. Il n’est pas rare encore aujourd’hui de venir aux sanctuaires dans des cortèges ornés de fleurs et de clochettes. 

Ces célébrations devant l’église de Scafati se font toujours en musique. Souvent, les musiciens ont la permission de rentrer dans l’église durant la célébration. Ils entrent en entonnant les chants d’invocation à la Madone (appelés canto a’figliola).

Cette fête est célébrée en dansant la Tammuriatta, danse omniprésente, car considérée comme un acte de dévotion. 

La danse, la Tammuriatta

La danse est un élément clé du syncrétisme entre le culte païen et la religion chrétienne, la danse faisant alors partie intégrante de la religion. 

C’est à travers cette danse que l’on peut comprendre le sens profond de la célébration, vivre l’expérience à travers son propre corps pour s’approcher au mieux de la culture de cette région qu’est la Campanie. Toujours dansée en Italie du Sud, de la Vallée du sud-est de Naples, Caserte, à la région entourant le Vésuve, jusqu’à l’Argo Nocerino, Nola et la côte amalfitaine, la Tammuriatta tire son nom de sa base rythmique, marquée par le tambour – le Tammorra – (tambour sur cadre aux nombreuses sonnailles en étain).

Définie comme étant l’expression esthétique de cette culture populaire ; véritable identité, la Tammuriatta permet au peuple de s’identifier et de s’exprimer. L’amour, le sacré et le profane sont représentés. 

Comme les tarentelles, elle est également l’héritage vivant de la Grèce antique, où il était tout à fait normal de mêler le culte religieux avec l’ivresse, la danse, la musique, la sensualité, tous, considérés comme des actes de dévotion. Dans la tradition grecque, il y a une conception de l’ordre (la religion) et du désordre (transe) complémentaires et non antagonistes.  Le « désordre » avait donc toute sa légitimité dans le culte religieux. Avec la chrétienté, tout ceci a été volontairement écarté. Pourtant, dans cette région de l’Italie, ces symboles subsistent sous différentes formes.